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Communiqué


Suite à la vive polémique médiatique et scientifique déclenchée par la publication de l’enquête EQP 19 réalisée par la Plateforme Pôle Enquête du LLSETI / USMB pour le compte du Ministère de l’Intérieur en mai 2020, le Conseil de laboratoire du LLSETI a demandé une évaluation de ce rapport au Professeur Didier Fassin (Directeur d’Etudes à l’EHESS, Professeur à l’Institute for Advanced Study, Princeton et au Collège de France, auteur de La Force de l’ordre, éd. du Seuil, 2011) – évaluation que nous citons ci-dessous.
 
Nous recommandons aux membres de la Plateforme d’en tenir compte méthodologiquement et éthiquement pour leurs prochains travaux.

« L’impression générale, après lecture attentive du protocole, des résultats et du communiqué de l’enquête est qu’elle ne peut pas être présentée comme un travail scientifique, d’une part à cause de la constitution de l’échantillon qui lui sert de base, et d’autre part au vu des modalités de recueil des données.
 
La pré-enquête, dite T-zéro (dont la présentation de la méthode et des résultats est squelettique dans le document envoyé), donne des “retours insignifiants”, qui sont interprétés par les enquêteurs comme un “repli” ou un “isolement” plutôt que comme un refus ou une méfiance, autrement dit en termes passifs plutôt qu’actifs - et donc politiques. Elle devient la justification de l’intervention des policiers pour choisir les enquêtés dans l’enquête principale au nom de “démarches plus ouvertes” et pour “favoriser la confiance avec l’usager”. Il y a certes des affiches, mais ces enquêtés spontanés représentent un cinquième de l’échantillon, et de toute façon, sont eux aussi biaisés. Que cet échantillon ne soit aucunement représentatif de la population, on peut en avoir une indication statistique dans le fait que les ouvriers représentent 2,2% du groupe sélectionné, quand ils sont 19,6% de la population française, soit près de dix fois plus en proportion.
 
On a donc un échantillon qui, non seulement, ne “représente” pas la population nationale, mais de plus, est sélectionné pour correspondre précisément à l’attente des enquêteurs qui demandent aux policiers d’aller sur le terrain mobiliser ceux qu’ils connaissent et qui auront sans aucun doute la meilleure image de la police. Les 85% d’opinions positives ou très positives déclarées concernant la police peut, dans ces conditions, sembler un score paradoxalement faible. »